Baldassi et autres c. France

Cour européenne des droits de l’Homme
11 juin 2020

Faits

Les requérants étaient membres d'un collectif local soutenant la cause palestinienne. Ils ont été poursuivis pour avoir appelé les clients d'un hypermarché à ne pas acheter de produits en provenance d'Israël, en vertu d'une loi française interdisant l'incitation à la discrimination. Les requérants ont été condamnés à verser des dommages et intérêts. 

La plainte

Les requérants se plaignent de leur condamnation pénale et invoquent l'article 10 de la Convention. 

Arrêt de la Cour

La Cour estime que la condamnation des requérants constitue une ingérence dans leur liberté d'expression. Cette ingérence était prévue par la loi et poursuivait le but légitime de protéger les droits d'autrui, à savoir le droit d'accès au marché des producteurs ou fournisseurs de produits en provenance d'Israël. La question était de savoir si l'ingérence était nécessaire dans une société démocratique. 

Tout d'abord, la Cour a noté qu'un appel au boycott est un moyen d'exprimer une protestation qui est couverte par l'article 10. Cependant, la Cour a noté qu'un appel au boycott est particulier en ce qu'il combine l'expression d'une opinion protestataire avec l'incitation à un traitement différent, de sorte qu'il peut parfois s'apparenter à une incitation à la discrimination. Selon la Cour, l'incitation à la discrimination est l'une des limites à ne jamais dépasser dans l'exercice de la liberté d'expression, mais la Cour a souligné que le simple fait d'inciter à une différence de traitement n'équivaut pas nécessairement à une incitation à la discrimination. 

La Cour a ensuite constaté qu'en l'espèce, les actes et propos litigieux avaient porté sur un sujet d'intérêt général concernant la situation des droits de l'Homme dans les territoires palestiniens occupés et s'étaient inscrits dans un débat contemporain en France. De plus, l'appel au boycott s'inscrivait dans une expression politique et militante, dont la nature est d'être controversée et souvent virulente. Selon la Cour, la limite à ne pas dépasser est qu'il ne doit pas se transformer en appel à la violence, à la haine ou à l'intolérance. En l'espèce, cette limite n'a pas été franchie. La Cour conclut que la condamnation du requérant n'était pas nécessaire et a violé l'article 10.

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Dernière mise à jour 09/12/2023